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UITA
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L’UITA appelle à une action globale urgente pour suspendre le diacetyl, un arôme alimentaire toxique

Inséré sur le site web de l'UITA le 16-Nov-2007

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L’UITA appelle les autorités gouvernementales de réglementation dans le monde à prendre les mesures nécessaires pour contrôler l’utilisation de l’arôme chimique diacetyl. Il a été prouvé que le diacetyl, utilisé comme ingrédient dans la fabrication de saveurs de beurre artificiel, provoque des maladies graves, voire fatales, chez les travailleurs/euses qui y sont exposés/es durant le processus de fabrication. Le diacetyl est notamment responsable de la bronchiolite oblitérante, maladie pulmonaire connue aujourd’hui aux Etats-Unis sous le nom de la maladie du « poumon des travailleurs du pop-corn ».

Bien que les études menées récemment aux Etats-Unis aient mis l’accent sur les conséquences de son utilisation dans la fabrication de pop-corn à mettre au micro-ondes, le produit est aussi largement utilisé dans les aliments surgelés et les snacks, la pâtisserie, les viennoiseries, les produits laitiers, les pâtes prêtes à cuire et autres aliments transformés. Le diacetyl est rarement spécifié comme ingrédient dans les produits alimentaires et se cache avec d’autres produits chimiques sous l’appellation « arômes artificiels ». En raison d’une réglementation et d’un étiquetage insuffisants, l’ampleur de l’exposition des travailleurs/euses dans la production alimentaire aux États-Unis et ailleurs dans le monde est inconnue.

Dans l’Union européenne, l’UITA a constaté un schéma inquiétant de complaisance et de déni de responsabilité face à cette dangereuse menace pour la santé des travailleurs/euses. Les organismes de réglementation, de sécurité et commerciaux que l’UITA a contacté ont admis que le diacetyl était couramment utilisé dans la transformation alimentaire mais n’ont pas souhaité donner de détails sur les produits concernés ou la manière dont ce produit chimique est utilisé, ni sur le nombre de personnes exposées ou toute autre précision liée à la surveillance sanitaire ou à la recherche sur l’exposition au diacetyl en rapport aux risques encourus sur les lieux de travail de l’UE.

Les autorités de santé et de sécurité au travail américaines savent depuis plus de cinq ans qu’une exposition, même de courte durée, au diacetyl peut entraîner une bronchiolite oblitérante, une atteinte progressive, irréversible et potentiellement mortelle des poumons. L’équipement de protection le plus courant – les masques respiratoires – ne protège en rien contre les effets de l’inhalation du diacetyl.

Depuis 2000, l’institut national américain de la santé et sécurité au travail (NIOSH) rassemble des preuves sur le lien entre l’exposition au diacetyl dans la transformation alimentaire et les lésions pulmonaires des travailleurs/euses. Parce que l’agence fédérale en matière de santé au travail (OSHA) chargée de transposer ces preuves en mesures concrètes tarde à adopter un cadre réglementaire, les syndicats et les défenseurs de la santé publique ont appelé à une action politique. Le 26 septembre 2007, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté un projet de loi qui (s’il est ratifié) obligerait l’OSHA à définir des normes d’exposition au diacetyl et à réglementer le temps d’exposition et les processus de contrôle et de suivi.

L’intérêt des médias, la menace d’actions en justice en Californie et sur le plan national, le nombre croissant d’actions intentées et gagnées, au nom des travailleurs/euses atteints/es, ont incité certains des principaux fabricants alimentaires américains à annoncer l’élimination progressive du diacetyl dans le beurre et son remplacement par d’autres ingrédients (non spécifiés). Une exception notable est Kraft, le deuxième producteur alimentaire mondial. En pleine bataille législative sur le diacetyl, Kraft s’est lancé dans la promotion de son nouvel arôme « Golden Toasted Butter », sensé être faible en calories et porteur d’un large éventail d’applications potentielles mais contenant du diacetyl. « Pour certains consommateurs, le diacetyl ne pose pas problème, pour d’autres oui » a indiqué Kraft. La FEMA, l’association nationale de l’industrie américaines des arômes artificiels, a soutenu le projet de loi du Congrès en faveur de l’adoption de normes contraignantes par l’OSHA.

Les autorités sanitaires et législatives de l’UE ne semblent pas troublées par l’accumulation des preuves concernant la toxicité du diacetyl aux Etats-Unis. La Commission européenne n’a aujourd’hui aucun projet d’examen de la sécurité de ce produit, indiquant simplement qu’il n’est pas sur la liste des priorités des produits à l’étude. Les directives de l’UE sur la santé et sécurité au travail n’établissent actuellement aucun seuil d’exposition au diacetyl, dont les conséquences de l’inhalation et d’autres formes d’exposition dans le processus de transformation alimentaire n’ont jamais été évaluées. La législation de l’UE sur les agents de saveur ne précise pas les quantités d’arôme pouvant être utilisés ni les catégories de produits alimentaires pouvant contenir des arômes artificiels. En réponse à une demande d’information de l’UITA, l’Association professionnelle européenne de l’industrie des arômes et des parfums (EFFA) a seulement confirmé que le diacetyl est produit dans l’UE, aux Etats-Unis, en Afrique du Sud et en Chine et qu’il existe sous sa forme naturelle ou sous forme manufacturée. L’ EFFA a toutefois refusé de préciser les noms et les sites de producteurs spécifiques ou les marques de produits contenant du diacetyl.

Certains producteurs européens ont réagi aux demandes croissantes d’action par l’adoption unilatérale de normes « sûres ». Les connaissances et les pratiques actuelles ne permettent toutefois pas de définir des seuils d’exposition sans danger, ni de préciser des techniques permettant de manipuler et d’utiliser le diacetyl de manière sûre. Dans ces circonstances, toute discussion sur une exposition acceptable, des pratiques sûres et une auto-réglementation de l’industrie constitue une mystification dangereuse.

Aucun/e travailleur/euse ne devrait être obligé/e de manipuler un produit provoquant une maladie professionnelle invalidante et potentiellement fatale. En l’absence d’une évaluation approfondie des risques encourus par tous/tes les travailleurs/euses potentiellement exposés/es au diacetyl, il n’y a simplement pas moyen de savoir si la situation prévalant aux États-Unis se reproduit ailleurs.

À la lumière des risques posés à la santé et à la vie des travailleurs/euses, l’UITA appelle ses organisations affiliées, l’ensemble du mouvement syndical et les organisations sanitaires chargées de la santé et sécurité des travailleurs/euses à demander immédiatement une action de la part des organismes de santé et sécurité nationaux et internationaux.

Toutes les informations disponibles concernant les produits et les marques contenant du diacetyl dans la production alimentaire doivent être mises à la disposition du public et être facilement accessibles. Les syndicats des travailleurs/euses de l’alimentation doivent officiellement participer comme partenaires actifs à un programme détaillé de recherches sur les risques liés à l’exposition au diacetyl sur le lieu de travail dans la production alimentaire, notamment en menant des enquêtes sur le terrain pour évaluer l’exposition éventuelle, une évaluation des méthodes de production et des mesures protectrices ainsi qu'une surveillance médicale rigoureuse de tous/tes les travailleurs/euses pouvant être exposés/es. Une appréciation des risques doit permettre d’évaluer si ce produit peut être entièrement éliminé, et si nécessaire remplacé par des alternatives plus sûres. L’état actuel des connaissances impose une suspension immédiate de l’utilisation du diacetyl sous réserve d’une évaluation détaillée des risques encourus sur le lieu de travail.