Home

Les nanomatériaux sont-ils la nouvelle amiante ?

10.06.14 News
Version imprimable

Un récent article (en anglais) du American Journal of Industrial Medecine rend compte en détail du premier cas pleinement documenté de maladie professionnelle liée au maniement de nanoparticules, celui d’une chimiste de 26 ans « qui travaillait avec de la poudre de nanoparticules de nickel, pesée et maniée sur une paillasse sans mesures de protection ». Après une semaine de manipulation de petites quantités de cette poudre, elle a développé un mal de gorge, une congestion nasale et une irritation de la peau. Dans ce court laps de temps, son corps a développé une sensibilisation aux minuscules particules de nickel. Malgré le fait qu’elle ait cessé de manipuler cette poudre et déménagé à un autre étage, les symptômes ont persisté et n’ont disparu que lorsqu’elle a définitivement quitté le bâtiment.

« Elle ne pourra plus jamais travailler dans ce bâtiment » indique le co-auteur de l’étude, qu’il qualifie de « premier cas bien documenté d’une personne maniant des nanoparticules dans un site de production aux Etats-Unis et dont le travail a entraîné  des effets néfastes sur sa santé ».

Les nanomatériaux – la production de matériaux naturels et synthétiques de dimension atomique ou moléculaire – ont une toxicité potentielle considérable en raison de leur taille qui provoque une plus forte réactivité que les particules de plus grande dimension. Les nanoparticules sont plus facilement absorbées par le corps humain et peuvent passer dans le sang et atteindre les organes, dont le cerveau. Il n’existe à ce jour aucune méthode pour limiter, contrôler ou même mesurer l’exposition d’une personne aux nanomatériaux et à leur processus de fabrication, sur les lieux de travail et ailleurs. Malgré les risques avérés, de nouveaux produits contenant des nanomatériaux sont mis chaque jour sur le marché et des milliers de travailleurs/euses sont exposés/es à des risques qui non seulement ne sont pas réglementés, mais n’ont même pas été identifiés.

Le projet sur les nanotechnologies émergentes (nanotech project – en anglais) du Woodrow Wilson Center américain estime que 3,4 produits alimentaires contenant des nanomatériaux sont mis sur le marché chaque jour. Une nouvelle étude de l’organisation Les Amis de la Terre, « Tiny Ingredients, Big Risks » (en anglais également) contient une liste très complète d’aliments et de boissons contenant des nano-ingrédients sans que cela soit mentionné sur l’étiquette, fabriqués par les principales transnationales, dont Coca-Cola, Danone Hershey, Kellogg’s, Mondelez, Nestlé, PepsiCo et Unilever. Ces produits contiennent tous du dioxyde de titane sous forme nanométrique qui selon des études, altère l’ADN, les fonctions cellulaires et le système immunitaire et qui pourrait être carcinogène si inhalé, entre autres risques.

La nanotechnologie est-elle la nouvelle amiante ? Comme pour l’amiante, sa toxicité pourrait ne devenir apparente que dans la durée, mais les risques potentiels sont déjà connus. Une action est nécessaire dès aujourd’hui pour protéger contre l’exposition aux nanomatériaux sur le lieu de travail. Pour commencer, les producteurs d’aliments (et d’autres produits) doivent informer les travailleurs/euses, les consommateurs et les autorités de réglementation des nanomatériaux qu’ils utilisent, de leurs applications spécifiques, des études menées pour établir leur sécurité sur le lieu de travail et pour l’environnement et des mesures prises pour limiter l’exposition à ce large éventail de risques. Un moratoire sur la commercialisation des produits contenant des nanomatériaux et leur processus de fabrication est plus urgent que jamais.