Publié : 20/09/2022
Crédit photo : UITA Asie-Pacifique. Le Sindh Women Workers Council SNPC, affilié à l'UITA, apporte son soutien aux femmes qui ont perdu leur maison et dont les champs sont inondés. Cela reflète les valeurs sociales collectives et l'action de solidarité, de compassion et de bienveillance que nous devons rétablir.

L'absence de justice sociale transforme la crise climatique en catastrophe climatique

Il ne fait aucun doute que nous entrons dans une ère de changement climatique catastrophique. Les vagues de chaleur, la sécheresse, les feux de brousse et les inondations augmentent en intensité et en fréquence dans le monde entier. Les inondations massives qui ont frappé le Pakistan en août ont gravement touché 30 millions de personnes, et plus de 1000 décès ont été signalés. Des ministres du gouvernement et des parlementaires ont décrit ces inondations comme une « catastrophe climatique ». Il est clair que toute reconnaissance officielle de cette inondation catastrophique comme ayant pour origine le changement climatique d'origine humaine représente un progrès significatif après des décennies de déni, de retard et d'obscurcissement de la part des gouvernements. Toutefois, il y a une différence importante entre reconnaître que l'intensité et la fréquence accrues des phénomènes météorologiques extrêmes sont la preuve d'un changement climatique catastrophique (la crise climatique), et déclarer une catastrophe climatique.

Plus de 30 millions de personnes ont été touchées par de graves inondations et des millions d'autres sont déplacées ou sans abri en raison de l'incapacité des gouvernements, depuis des décennies, à fournir les services publics, les infrastructures, les logements et la protection sociale nécessaires pour faire face à cette crise. C'est l'absence de protection physique financée par des fonds publics (forêts et mangroves protégées, conservation des terres et des sols, digues, levées, canaux, logements sociaux et logements abordables, accès à l'eau potable) et l'absence de protection sociale universelle – en particulier pour les femmes, les travailleurs-euses du secteur informel et les travailleurs-euses migrant-e-s – qui a permis à ces inondations de devenir la tragédie qu'elles sont.

L'exclusion, la marginalisation et la négligence des communautés rurales sont courantes dans les pays où les gouvernements ont réduit les dépenses publiques consacrées aux soins de santé, aux services de distribution d'eau et aux infrastructures publiques nécessaires pour soutenir les agriculteurs et les pêcheurs à petite échelle et marginaux. Au sein de ces communautés, la marginalisation des femmes et des peuples indigènes/premières nations est encore plus grande. Ceux qui sont systématiquement privés de leurs droits et marginalisés subissent les pires effets des événements climatiques extrêmes. Alors qu'ils souffrent déjà d'une mauvaise santé due au manque d'accès à un logement adéquat, aux soins de santé, à l'eau, à l'assainissement et à la nutrition (qui sont tous des droits humains universels), l'assaut des événements climatiques extrêmes est dévastateur. C'est l'absence de droits qui fait de cette crise climatique une catastrophe climatique pour des centaines de millions de personnes dans le monde.

La nécessité urgente de réduire les émissions de carbone par l'industrie des combustibles fossiles pour éviter un changement climatique catastrophique a été comprise il y a plus de quarante ans. (Le titre du mémo du conseiller scientifique principal du président américain Jimmy Carter, Frank Press, en 1977, ne pouvait être plus clair : « Le rejet de CO2 fossile et la possibilité d'un changement climatique catastrophique ».) Mais cet appel à la réduction des émissions de carbone et au contrôle de l'industrie des combustibles fossiles a coïncidé avec l'avènement de l'attaque néolibérale de Thatcher et Reagan contre les dépenses publiques et les infrastructures sociales, les biens et services publics et – plus important encore – nos valeurs sociales collectives. Reproduit dans le monde entier – y compris par plusieurs gouvernements sociaux-démocrates et travaillistes – le néolibéralisme a, au cours des 45 dernières années, non seulement sapé la capacité des gouvernements à protéger la planète et la santé publique. Il a systématiquement démantelé nos droits aux types d'infrastructures sociales publiques dont nous avons si désespérément besoin aujourd'hui. Les hôpitaux, le logement, l'éducation, les services d'électricité et d'eau ont été privatisés alors que presque tout est devenu une marchandise achetée et vendue pour le profit. Cela inclut l'accès à l'eau potable – un droit humain fondamental.

L'intensité et la fréquence accrues des vagues de chaleur, des incendies de forêt, des inondations, des sécheresses et d'autres phénomènes météorologiques extrêmes ont relancé les appels à rétablir nos droits humains fondamentaux et les valeurs sociales collectives qui donnent un sens à ces droits. L'accès à des biens et services publics gratuits, à des services publics, à des infrastructures – à une protection physique et sociale financée par des fonds publics – est ce dont les communautés rurales et agricoles ont besoin de toute urgence. C'est particulièrement vrai pour les femmes, les enfants, les migrant-e-s et les peuples autochtones/premières nations.

C'est d'autant plus important que ces mêmes communautés rurales et agricoles marginalisées et négligées doivent nourrir le monde. Sans une protection physique et sociale financée par des fonds publics et sans le soutien des gouvernements, les phénomènes météorologiques extrêmes provoqués par le changement climatique induit par l’activité humaine engendreront des crises alimentaires continues, conduisant à une insécurité alimentaire mondiale encore plus grande.

Fondamentalement, il s'agit de placer la justice sociale au centre de notre réponse à la crise climatique et de défendre la santé planétaire. C'est ce que l'on entend au sens large par justice climatique. Rappelons la première ligne du rapport final de la Commission de l'OMS sur les déterminants sociaux de la santé en 2008: « La justice sociale est une question de vie ou de mort ». En effet, dans cette crise climatique, la justice climatique est une question de vie ou de mort.

En effet, dans cette crise climatique, la justice climatique est une question de vie ou de mort.
Hidayat Greenfield, secrétaire régional de l'UITA Asie-Pacifique